William était à peine arrivé à Astoria que déjà on lui demandait de venir pour son projet avec Hermès à Paris. Non pas que cela ne lui plaisait pas, mais il venait seulement d’arriver à Astoria, et on ne pouvait pas dire que le temps d’avion entre Astoria et Paris était le même qu’entre Londres et Paris. Sans oublier le décalage horaire. Il s’y rendait parce qu’il y avait un entretien important, suivi d’un gala, sinon, il aurait sans doute négocié en vue que cela se fasse à distance, par téléphone ou en visio. Il s’était donc retrouvé dans cet avion, l’heure d’arrivée serait le petit matin à Paris, et il se disait que cela serait l’occasion de prendre un bon petit déjeuner en terrasse, avant d’aller prendre une douche à l’hôtel qu’il avait réservé. Il s’était assis sur le siège qu’on lui avait désigné, non sans répondre une réplique séductrice au passage à l’hôtesse, avant de s’installer confortablement côté hublot. Il n’avait pas vraiment l’intention de prêter attention à la personne qui serait à côté de lui, préférant sans doute dormir durant le voyage, quand il n’aurait pas le nez collé au hublot pour regarder à l’extérieur. La personne s’assit à côté de lui, il la salua brièvement avant de bien s’enfoncer dans son siège, paré pour le décollage.

Il attendait donc le décollage qui ne vint pas. L’avion n’avait même pas encore démarré. Il trouvait le temps long, anormalement long alors qu’on leur demandait de patienter suite à un problème technique rencontré. William regarda sa montre, maugréant légèrement. Ils auraient dû être partis depuis une heure, il pouvait dire adieu à son petit-déjeuner en terrasse si cela continuait… Il n’aurait d’autres choix que de prendre le croissant américain qu’on lui offrirait avec un café passable. Il soupira, c’était bien sa veine.

Cela faisait un moment que Maxence n'était pas allé à Paris. Cela lui manquait d'ailleurs, mais il n'avait jusque là pas eu d'obligation d'y aller et il avait préféré resté avec Axel à Astoria pendant que celui-ci participait au remake d’un film très connu. Pour sa part, il continuait sa carrière en tant que mannequin, la seule qui fonctionnait réellement aux Etats Unis pour lui. Il avait passé quelques castings mais n’avait jusque-là, pas été retenu. Et d’ailleurs, c’était en tant que mannequin qu’il retournait à Paris puisqu’il devait participer à un défilé pendant la semaine de la mode. Il avait quelques jours d’avance mais il avait prévu d’aller faire un petit tour chez ses parents en Normandie avant de se rendre à ce défilé. Il était impatient de pouvoir retrouver son pays dans lequel il n’avait pas été depuis des mois. La séparation avec Axel pendant quelques jours le stressait un peu, et en même temps, il savait que c’était une bonne chose, ce n’était qu’une petite semaine après tout. Arrivé dans l’avion avec de l’avance, il m’installait à sa place. Pas près du hublot, cela le rendait malade et puis c’était toujours plus pratique de s’installer côté couloir, au moins, il ne dérangerait pas la personne a côté de lui. Et il s’installa donc à sa place saluant son voisin de voyage avant de mettre ses écouteurs dans ses oreilles. Rien ne valait un peu de musique avant le décollage et même pendant, cela l’apaisait. Il n’était jamais rassuré en avion.

Il ne se rendait pas vraiment compte de ce qu’il se passait, au bout d’un moment, il y eut comme une agitation. Cela faisait un moment qu’il était assis mais il n’avait pas vraiment la notion du temps. Il finit par remarquer du mouvement de son voisin, il défit un écouteur pour le regarder. « Ils ont fait une annonce ? » Parce que clairement, Maxence n’avait rien entendu, bien trop pris par sa musique. Finalement, il ajouta. « Au fait, je m’appelle Maxence » Autant faire une présentation, surtout s’ils étaient coincé là pendant encore du temps. Sauf s’ils finissaient par être évacué et rediriger vers une correspondance.

Normalement tout était calculé pour qu’il puisse partir sereinement, du décollage jusqu’à l’atterrissage, sans oublier le petit croissant en terrasse pour se faire plaisir avant de démarrer sa journée qui était bien chargée. Pourtant, rien ne se passait comme prévu. Le décollage tardait à venir et l’annonce faite par l’équipage n’augurait rien de bon. Ils évoquaient un problème technique mais ne semblait pas dire combien de temps cela prendrait. Peut-être qu’ils attendaient d’en être sûrs, ou bien peut-être étaient-ils déjà en train d’organiser un second vol pour ces passagers qui restaient sur place, à regarder leur montre pour certains, comme le faisait régulièrement William qui voyait la perspective d’un bain de soleil en terrasse et d’un bon croissant français s’envolait. Son voisin sembla alors remarquer que quelque chose n’allait pas, retirant l’un de ses écouteurs. Au moins, s’il y avait bien une chose qui était respectée dans sono plan, c’était son voisin qui semblait tout aussi peu bavard que lui en avion, et qui s’était refugié dans une sorte de bulle à l’aide de ses écouteurs. Si bien, d’ailleurs, que le jeune homme n’avait même pas remarqué qu’ils étaient restés sur place. William fit un hochement de tête et répondit alors à son voisin : « Ils disent qu’il y a un problème technique mais ils ne nous ont rien d’autre, donc en clair, on ne sait pas si l’avion va décoller un jour ou s’ils vont nous trouver une solution. » Bon, il avait tenté de se contenir mais il était un tantinet agacé par la situation, comme son voisin allait sans doute s’en apercevoir. Pour autant, il trouvait ce dernier sympathique alors qu’il se présenta. « Enchanté Maxence, moi c’est William. » Il fit un sourire avant d’ajouter : « Désolé, d’habitude je ne suis pas si ronchon. C’est juste que j’ai une journée chargée qui m’attend à Paris et que je pensais pouvoir prendre le temps de profiter un peu avant d’aller à mon premier rendez-vous… » expliqua-t-il en faisant une moue. « Mais vu l’heure, je vais devoir me contenter d’un piètre croissant qu’on nous servira sûrement. » Tant pis. De toute façon, que pouvait-il y faire ? « Et vous ? Vous partez visiter Paris ? » lui demanda-t-il. En dehors de la curiosité, il s’agissait aussi de faire un peu connaissance avec son voisin.

Maxence était plutôt du genre bavard, enfin, bavard avec ceux qu’il connaissait. Car quand il s’agissait d’aller quelque part seul, il essayait de rester dans son coin et de ne pas être trop envahissant. Cela lui avait valu des critiques auparavant et clairement il n’avait pas envie d’ennuyer quelqu’un qui avait sans doute envie de profiter d’un vol calme et silencieux. C’était pour cela qu’il se réfugiait dans de la musique et cela l’aidait aussi à calmer son stress quand il devait prendre l’avion car ce n’était pas son moyen de locomotion préféré, il était plutôt bateau ou train, mais l’avion, cela n’était pas vraiment son truc. Pourtant, il n’avait pas trop le choix que de le prendre pour rentrer en France, sinon, il lui faudrait un mois de bateau pour regagner la côte Ouest de la France. Inutile de dire qu’en cas de projet professionnel, ce n’était même pas envisageable un instant. Malgré cette envie de s’isoler, il remarqua quand même un peu rapidement qu’il se passait quelque chose, mais quoi ? C’était bien là une chose qu’il ignorait. « D’accord, en gros, soit ils trouvent une solution, soit ils vont nous débarquer pour un autre avion non ? » Peut être qu’en réalité, le vol serait tout simplement annulé, enfin Maxence en doutait, ce n’était pas vraiment dans le genre des compagnies aériennes, mais il ne pouvait être sûr de rien à cet instant. « Enchanté ! » Cela n’arrangeait pas du tout ses affaires. Il devait impérativement se rendre à Paris. Maxence rit un peu à ce qu’il venait de dire. « Oh, ne vous en faite pas, j’ai pas dû l’air plus amical à me plonger dans ma musique. J’ai du mal avec les voyages en avion. » Maxence était pourtant jovial d’ordinaire, mais là, clairement cela faisait étrange d’être avec un inconnu. « Je suis comme vous, rendez-vous professionnel à Paris peu de temps après l’arrivée qui était prévue à la base. Je vais devoir trouver un moyen de décaler au moins le premier rendez-vous avec mon agence ou le faire en visio si cela s’éternise. » Il esquissa un sourire avant d’ajouter. « Oh non, Paris, je connais, je viens de là-bas, j’y ai passé une bonne partie de ma vie. Mais je travaille pour une agence internationale donc je n’ai pas le choix que de revenir à Paris de temps en temps. » Il avait au moins cette chance de pouvoir retourner chez lui parfois. « Votre rendez-vous n’est pas tout de suite à l’atterrissage ? Vous aurez peut-être l’occasion encore de manger un bon croissant Parisien. Il y a souvent de bonnes boulangeries dans les aéroports. » Cela ne valait pas les vraies boulangeries parisiennes, mais cela faisait l’affaire quand même et c’était mieux que rien.

C’était sans doute la première fois qu’il se retrouvait coincé dans un avion à se demander s’il allait un jour décoller. Il avait déjà eu des vols qui avaient eu du retard, mais habituellement, il attendait à l’aéroport et non dans l’avion. Son compagnon de route résuma assez justement la situation : soit ils trouvaient une solution à ce problème technique s’il n’était pas trop grave, soit ils attendaient qu’un autre avion arrive pour leur permettre d’embarquer dans ce dernier, afin de rejoindre leur destination. « C’est bien ça. » affirma William en hochant la tête. Seulement, le Britannique se demandait combien de temps cela prendrait.

Les deux hommes se présentèrent chacun leur tour, tandis que William se sentit malgré tout obligé de s’excuser pour sa mauvaise humeur. Il eut un sourire à la phrase du jeune homme. « Il n’y a pas de soucis. Pour tout vous dire, j’avais un peur de tomber sur une personne bavarde… » admit-il en riant légèrement. Le dénommé Maxence expliqua qu’il avait également un rendez-vous professionnel à Paris, auquel il devait se rendre aussitôt après être arrivé. Lui aussi se demandait s’il allait pouvoir y être à temps, ou s’il allait devoir le décaler ou le faire à distance.  « J’espère que vous allez pouvoir y être à temps. » fit l’acteur. Il savait comme cela pouvait générer du stress, se sentant lui-même dans cet état actuellement, même s’il essayait de relativiser. Il arriverait sans doute à temps, ce qui l’embêtait c’était de devoir courir à son arrivée et de ne pas pouvoir flâner tranquillement comme il se l’était imaginé en entrant dans l’avion. Maxence lui apprit qu’il connaissait bien Paris, car il en était originaire. « Je me disais bien avoir entendu un léger accent, mais je n’étais pas sûr. » dit-il en souriant. « Oui, sans doute. C’est moi qui en fais une montagne mais en soi, ce n’est pas très grave non plus. Je m’en remettrai. » dit-il en riant légèrement.

Maxence n’était pas du genre à paniquer ou à s’inquiéter, bien que là, il était dans une situation telle qu’il se demandait s’il allait pouvoir honorer son obligation professionnelle. Il avait un peu de marge devant lui, mais il devait se rendre à l’évidence qu’il n’allait certainement pas pouvoir se rendre là où il devait aller assez rapidement. Il verrait bien comment cela allait se dérouler, pour l’instant, deux solutions se présentaient, être un peu patient. Cela ne faisait pas si longtemps, il ne fallait pas encore paniquer, juste espérer qu’une solution arriverait rapidement. « Cela ne présage rien de bon pour maintenant, il va falloir que nous nous armions de patience. » Ce qui n’était clairement pas le fort du jeune homme.

Maxence eut un léger rire en regardant le jeune homme à côté de lui. « Et bien, vous avez de la chance que je ne le soit pas. Pas tous les jours en tout cas. » Et pas avec n’importe qui. Il pouvait se montrer bavard mais pas tout le temps. En tout cas, dans les avions, il préférait s’isoler, de toute façon, nombreuses étaient les personnes qui préféraient être tranquille lorsqu’elles partaient en voyage et pas entendre quelqu’un parler pendant toute la durée du vol, surtout quand c’était un vol long-courrier comme c’était leur cas. « On verra bien. Je n’ai pas envie de me stresser pour cela. Au pire, je décalerais le rendez-vous. C’est les aléas des transports, quels qu’ils soient. » Et quand il s’agissait de presque une demi journée de vol, il fallait comprendre que c’était indépendant de toute volonté propre. « En effet, difficile pour moi de cacher mes origines, j’ai un accent horrible. » Et d’ailleurs, il avait bien remarqué que son comparse n’était pas américain. Son accent était bien plus prononcé que la plupart des américains. Sans doute était-il anglais. Maxence avait appris au fil du temps à reconnaitre les différents accents. Surtout grâce aux différentes séries qu’il regardait quand il en avait l’occasion. « Il y a toujours l’option vol privé, mais j’en ai pas les moyens, alors, on va attendre, la situation va bien se débloquer. » Maxence était réaliste, la compagnie allait trouver une solution. Une nouvelle annonce se fit entendre. « Nous faisons des contrôles sur l’avion. Nous vous demandons de bien vouloir rester dans vos sièges. » Ce qui fit doucement sourire Maxence qui avait remarqué que certains passagers étaient déjà sortis de l’appareil. « C’est important votre rendez-vous sur Paris ? » Parce que pour Maxence c’était un rendez-vous professionnel, mais pour lui, c’était peut-être plus urgent. Un proche malade, une petite amie à retrouver… beaucoup de possibilité.