Malheureusement, ou heureusement, pour les hommes au coeur brisé, ou presque!, je sais les reconnaître. Ayant moi-même vécu la plus grande trahison que la terre puisse porté, ma mère, cette sale garce, qui m'avait volé mon mec, je pouvais ressentir, et voir, la douleur à distance. J'avais sans doute le complexe de la sauveuse, parce que, voulant remonter le moral à ce joli châtain, j'avais décidé de lui offrir son premier drink de la soirée. Je le vois ranger son porte-monnaie, l'air surpris un peu. Je ne peux m'empêcher de lui sourire à nouveau. Il semblait si différent des autres mecs qui venaient s'asseoir à mon comptoir pour boire leur peine, leur désespoir ou leur victoires.
« Tout le plaisir est pour moi, honnêtement!» lui dis-je en voyant son visage s'éclairer d'un magnifique sourire. J'étais satisfaite de ce que j'avais provoqué chez lui. Il ne semblait vraiment être heureux à ce moment et c'est tout ce qui comptait pour moi. Il faut dire qu'un client satisfait est un client qui revient et qui nous fait de la publicité gratuite et positive.
« Enchantée également!» lui dis-je en souriant également. Je ne peux m'empêcher d'ajouter :
« J'aurais plutôt opté pour Brandon, mais, Alexander c'est chouette aussi!» lui dis-je en riant.
« Ça m'amuse bien de deviner les prénoms des gens!» dis-je à nouveau en souriant. Les clients commençait à prendre place. Il faut dire qu'en étant vendredi, les cinq à sept remplissait souvent mon bar considéré comme étant l'un des plus branchés en ville... ou devrais-je dire, en bordure d'une forêt!
Nous poursuivons notre conversation et je le vois se mettre à l'aise. Je sens que nous aurions droit à soirée bien divertissante des deux côtés. Lui semblait avoir besoin d'une oreille attentive, et moi, j'avais désespérément besoin de me changer les idées alors quoi de mieux que d'écouter les problèmes des autres. Au moins, pendant ce temps, les miens étaient très loin.
« Ohhh, ça non! J'ai une sacrée moyenne au bâton en ce qui concerne les coeurs fragiles!» dis-je en souriant tristement. Jenny lui sert son verre et il nous le lève en nous remerciant. Je me sers un shot de vodka et lui lève également mon verre :
« Aux nouvelles rencontres!» dis-je en cognant mon verre contre le sien en le buvant cul-sec. Je sens une certaine complicité s'installer entre nous. Il était de loin le client le plus agréable que j'avais servie depuis longtemps.
« Et bien, c'est le nouvel endroit en vogue!» dis-je, un sourire malicieux aux lèvres.
« Bingo!» dis-je en levant mon index et mon pouce pour le pointer.
« En fait, j'suis la gérante, mais cette hôtel était à mon grand-père et maintenant à mon père... si on fait le calcule, ça sera à moi dans quelques années!» dis-je bien fière de moi-même. Il faut dire que je travaillais fort afin de rendre cette endroit potable et agréable pour tous. Un jour, j'aurais droit à ma part de gâteau, comme mon père l'avait eu avant moi.
C'est alors que je vois mon interlocuteur devenir timide après qu'il m'ait fait deux beaux compliments. Cela venait directement me toucher droit au coeur. J'y mettais beaucoup du mien et j'essayais de créer ma place dans le monde des affaires qui ne laisse pas grand places aux jeunes femmes de vingt-cinq ans. Il faut dire que je pensais bien me débrouiller jusqu'ici.
« Bah contente de vous l'entendre dire!» dis-je. C'est alors qu'il me complimenta sur le fait que j'étais charmante. Je ne peux m'empêcher de sourire de toutes mes dents. Bien évidemment que ce n'était pas de la drague, j'avais vu son alliance à l'annulaire gauche.
« Votre femme est bien chanceuse de vous avoir, en tout cas! Des hommes aussi gentil, ça ne court pas les rues, ici!» dis-je en pointant son alliance du menton.