Il était arrivé depuis quelques jours, et déjà, à peine posé qu’il était déjà en vadrouille en ville, retournant dans les lieux qu’il connaissait, et qu’il avait laissés derrière lui après son départ l’an passé. Son retour était resté plutôt discret jusque-là, en dehors de Margot qu’il avait revue par hasard à la plage, après qu’il avait été surfé. S’il y avait bien une personne qu’il avait redoutée revoir, c’était bien elle, tout simplement parce qu’il avait peur du flot de souvenirs et d’émotions douloureuses que ces retrouvailles apporteraient avec elles. Depuis son arrivée, une autre préoccupation avait pris place dans sa tête : Jenna. Il était tombé sur différents articles qui affichaient au monde entier que Richard avait commis l’impensable sur une autre actrice, Katie. William savait que cette histoire allait chambouler la vie de sa meilleure amie Lily, mais également d’une autre personne à laquelle il tenait beaucoup : Jenna. Quand il pensait à elle, il éprouvait des regrets ; des regrets de l’avoir embrassée, de l’avoir évitée par la suite, sans lui donner de nouvelles depuis son départ. Il se doutait que la jeune femme devait terriblement lui en vouloir, mais avec le recul, il s’était senti dépassé par tant de choses, et c’était probablement la raison pour laquelle il était parti.

Alors, il estimait qu’il était temps de tenter de réparer ses erreurs, surtout au vu de ce qui se disait dans la presse ; la jeune femme aurait probablement besoin de soutien. Équipé d’un beau bouquet de fleurs, il se présenta à sa porte, sonnant. Il avait hésité entre des fleurs et du chocolat mais il trouvait que les fleurs étaient bien plus sympathiques en guise de cadeau d’excuse.La porte finit donc par s’ouvrir sur son amie, seulement habillée d’une serviette de bain. Il devait bien admettre que c’était une belle femme, attirante, et que ce n’était pas ce sentiment d’attirance qu’il ressentait vers elle qui allait le contredire. Pourtant, elle le ramena bien vite sur terre, l’assénant d’une gifle en guise de salutation. Elle bougea légèrement sa mâchoire, sentant sa joue douloureuse. Elle n’y avait pas été de main morte. Il se disait finalement qu’il aurait probablement dû opter pour le bouquet de fleurs et le chocolat. Le chocolat était bien connu pour adoucir l’humeur, non ? « Ok, je l’ai sans doute mérité. » lui dit-il alors. « Je suis venu m’excuser pour mon comportement et de ne pas t’avoir donné de nouvelles. » ajouta-t-il. « Et aussi pour voir comment tu allais, car j’ai appris pour Richard. » Il était cependant loin de se douter que la maladie de la jeune femme était revenue.

 

En arrivant à sa porte, il ne s’attendait sans doute pas à un tel accueil, asséné d’une gifle. Il l’avait probablement mérité, mais il en restait malgré tout sonné, même si finalement il n’était pas si surpris. Il aurait dû s’y attendre. Il l’avait évitée pendant un an, après l’avoir embrassée juste avant de quitter Astoria. Il avait fait n’importe quoi. Il s’était laissé emporter, alors qu’il traversait la pire épreuve de sa vie, perdant son enfant. Il s’était tellement préparé à être père, s’était fait à l’idée, accompagnant Margot du mieux qu’il avait pu durant sa grossesse. Perdre cet enfant, même s’il n’était pas encore né, cela avait été douloureux, bien plus qu’il ne l’avait imaginé. Il avait ressenti le besoin de s’éloigner d’Astoria et de s'occuper l’esprit ailleurs, avec d’autres… En un an, il en avait eu des relations mais qui n’avaient été que de passage, ne cherchant pas à s’établir sur du long terme. Il ne voulait plus s’attacher, ne voulait plus faire de projets, seulement profiter de l’instant présent. Carpe diem, comme qui dirait. Ainsi, la colère de la jeune femme à son égard était justifiée, et à mesure qu’elle lui énonçait les différents comportements qu’il avait eus, il fit une mine désolé. « Je suis désolé, Jenna. » dit-il alors qu’il s’apprêtait à développer ses excuses, mais qu’il fut empêché en entendre des bruits de pas. « C’est différent. » lui dit-il. Lily était sa meilleure amie, ils n’avaient pas la même relation. Il avait à peine eu le temps de finir sa phrase qu’elle l’avait entraîné vers l’intérieur de chez elle. « J’ai toujours rêvé de me faire entraîner de cette façon par une femme chez elle. » fit-il, amusé, même s’il devait bien admettre aimer le goût du risque, il s’exposait à une nouvelle gifle ou à une nouvelle vague de colère de la part de la jeune femme. « Je suis venu m’expliquer, Jenna, parce que ce n’est pas juste pour toi. Ce que j’ai fait est… » Il chercha le mot juste pour le qualifier mais ne trouva pas. « J’étais perdu, j’ai fait n’importe quoi. Tu étais là, si attentive, si tendre avec moi et je ne sais pas ce qui m’a pris, je me suis laissé emporter. Je n’aurais pas dû t’embrasser. » dit-il en soutenant son regard. « Et j’aurais dû t’appeler avant, mais je me sentais honteux, et dépassé par ma vie. C’est pour cette raison que je suis parti d’Astoria. J’avais besoin de mettre de la distance avec tout ça. »

 

Jenna était assez froide, plutôt fermée mais pouvait-il lui en vouloir alors qu’il avait sciemment disparu de sa vie pendant un an et n’avait pas daigné lui donner de nouvelles ? Le fait était qu’il avait préféré faire l’autruche et laisser derrière lui ce qu’il avait fait. Alors, il comprenait qu’elle lui en veuille, et qu’elle n’entende pas ses excuses. Pour autant, il trouvait injuste qu’elle lui lance cela sur Lily. Celle-ci était sa meilleure amie, et si durant leur jeunesse, ils avaient effectivement envisagé une relation, cette dernière s’était éteinte voilà déjà quelques années et il ne la considérait pas plus que comme sa plus chère amie qui le connaissait presque par cœur. « Arrête, Jenna, tu es injuste. » lui dit-il simplement alors qu’elle l’entraîna à l’intérieur de chez elle. Il ne put s’empêcher d’émettre une réplique qui d’ordinaire aurait sans doute pu la faire rire. Seulement, le contexte ne s’y prêtait pas et il savait qu’il s’exposait aux foudres de la jeune femme qui ne tardèrent pas à s’abattre sur lui, alors qu’il constatait le regard noir qu’elle lui lançait. Il émit une légère grimace presque imperceptible, se disant qu’il aurait probablement dû tourner la langue plusieurs fois dans sa bouche avant de lui répondre. Il tenta alors de s’expliquer vainement sur ce qu’il avait fait, sachant au fond que peu importe ce qu’il lui dirait, elle ne trouverait aucune excuse valable. Il soupira. Il ne savait pas vraiment pourquoi il avait fait ça, il ne se l’expliquait toujours pas. Il adorait Jenna, il la trouvait attachante, et elle avait toujours été une oreille attentive surtout lorsqu’il s’était senti au plus mal. Et puis, il devait bien admettre qu’elle était terriblement attirante, comme en ce moment alors qu’elle le recevait en simple serviette de bain. Il devait bien admettre que bien des pensées lui traversaient l’esprit, alors même qu’il savait qu’elle était mariée. Mais il restait un homme ; un homme, qui aimait les belles femmes. « Nous sommes amis. » affirma-t-il en la regardant dans les yeux. « Comme je te l’ai dit, je me suis laissé emporter. Tu étais là pour moi, tu m’écoutais, et j’étais vulnérable. Je ne sais pas ce qui m’a pris, je ne me l’explique toujours pas. Je sais que je n’aurais pas dû attendre tout ce temps pour venir vers toi et m’excuser. » dit-il alors. « J’ai fait n’importe quoi, je suis désolé. » Il la regarda, mimant le regard du chat botté. « Est-ce que tu vas continuer à m’en vouloir ? »

 

Probablement que s’il s’était excusé presque aussitôt et n’avait pas attendu autant de temps pour revenir vers elle, elle aurait réagi autrement. S’il n’avait pas fui, elle aurait probablement accepté ses excuses et comprit que dans un moment de vulnérabilité, il s’était laissé emporter, probablement poussé par une attirance physique envers elle. Il la savait pourtant mariée, et était d’ailleurs l’un des mieux placés pour le savoir, étant donné qu’elle le confiait presque tout. Il s’en voulait d’avoir mis à mal leur relation alors qu’être avec elle lui avait toujours apporté beaucoup de bien. Mais il avait traversé une épreuve difficile, et en fuyant, ce n’était pas seulement Jenna qu’il fuyait, mais cette peine douloureuse, difficile à encaisser. Le deuil était compliqué, et probablement qu’il ne l’avait toujours pas entièrement fait, mais un jour il le serait sans doute capable. Seulement, pour l’instant, il avait l’impression que s’il faisait son deuil, c’était comme oublier que tout cela avait existé et cela ne lui paraissait pas juste. Pas encore.

Il savait qu’en se pointant chez Jenna, il prenait le risque qu’elle lui claque la porte au nez. Elle semblait peu convaincue par ses propos, mais il réussit malgré tout à passer sa fausse carapace en lui faisant les yeux doux, ce qui le fit sourire. « Je sais et je sais aussi qu’il est bien musclé. Je n’ai pas envie d’abîmer ce beau visage. » dit-elle, en prenant une pose, bien conscient pourtant qu’il marchait encore sur des oeufs, elle ne lui avait encore rien pardonné. « C’est déjà ça ! Je préfèrerais aussi. » Il esquissa un léger sourire alors qu’il reprit une mine plus sérieuse. « Comment tu vas ? » s’enquit-il. Il avait entendu bien des rumeurs et ne savait même plus ce qui était vrai.

 

Depuis qu’il était parti, il n’avait pas eu de nouvelles de la jeune femme, si ce n’était par les journaux, à travers différents articles. C’était ainsi qu’il avait appris un certain nombre de choses, et notamment dernièrement concernant l’accusation de Richard. C’était sans doute ce qui l’avait motivé à se présenter à sa porte alors qu’il ne l’avait pas vue depuis de nombreux mois. Cependant, il comprenait qu’elle doive le dire à son mari, même s’il était étonné que depuis le temps, elle ne le lui avait toujours pas avoué. Y avait-il une raison à cela ? « Au risque de me faire gifler de nouveau, pourquoi tu ne le lui as pas dit avant ? Je veux dire, ce baiser ne date pas d’hier… » Après tout, depuis qu’il était parti, elle avait sans doute eu bien des occasions pour dire à son mari que son cher ami William, qu’elle ne croyait être que son ami, s’était permis de l’embrasser avant de partir. Probablement que son mari allait également s’interroger à ce sujet, sauf si elle omettait de préciser de quand cela datait. Cependant, elle avait raison sur un point : son époux n’allait sans doute pas le porter dans son cœur. Quand il y réfléchissait, ces deux-là partageaient un drôle de mariage, peu conventionnel, et il ne savait même pas s’ils avaient fini par réellement se mettre ensemble. Il les avait toujours soupçonnés de nourrir des sentiments l’un envers l’autre, mais aucun ne semblait décidé à se déclarer à l’autre. Peut-être que depuis son départ, les choses avaient changé. A son avertissement, le blond fit une légère grimace ; sa joue rouge se souvenait encore de l’effet de sa main et elle n’avait guère envie de retenter l’expérience. Alors qu’il s’attendait à peut-être se faire renvoyer paître, ayant perdu le privilége d’être le confident de la jeune femme, il se risqua de lui demander comment elle allait. Elle resta évasive, et il sentit une pointe de déception en lui, alors qu’il se rendait compte qu’il n’était plus celui à qui elle confiait ce qui la tracassait. En même temps, il avait perdu ce privilège en rompant le contact, après l’avoir embrassée et laissée dans le flou le plus total. Même s’il le comprenait, il n’en était pas moins peiné au fond. « Ca va. » choisit-il de répondre à son tour, en haussant les épaules. Néanmoins, face à ce regard noisette, il sentait qu’il devait faire mieux que cela s’il voulait retrouver une place d’ami, voire de confident, à ses yeux. « Je ne pensais pas que revenir à Astoria serait si… douloureux. J’ai quitté la ville, j’ai évité Margot, et pourtant, ça ne va pas mieux. » Enfin si, sans doute un peu, et heureusement, mais il sentait toujours le poids du deuil sur ses épaules. « Ca finira par passer, un jour. » Il fallait rester optimiste. « Et toi ? J’ai lu dans les journaux cette histoire concernant Richard… »